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ALLOCUTION DE MONSIEUR FRANÇOIS TAVENAS, RECTEUR DE L'UNIVERSITÉ LAVAL, À L'OUVERTURE DU COLLOQUE "L'ACHETEUR DU TROISIÈME MILLÉNAIRE" LE JEUDI 16 SEPTEMBRE 1999,
À 10 H, AU MANOIR DU LAC DELAGE

Mesdames,
Messieurs,

Vous me voyez très honoré d'ouvrir ce colloque intitulé "L'acheteur du troisième millénaire" et de donner le coup d'envoi aux réflexions et délibérations auxquelles vous avez été conviés au cours des deux prochaines journées. Je souhaite la bienvenue à tous les membres du Regroupement des gestionnaires d'approvisionnement des universités québécoises et aux conférenciers qui ont accepté de venir partager leur expérience et leur compétence.

À titre de président de la CREPUQ, je suis heureux de constater le dynamisme du Regroupement des gestionnaires en approvisionnement des universités du Québec. Vos actions en synergie permettent à chaque institution de faire, chaque jour, des économies substantielles. Votre coopération permet à chacun d'entre nous de mieux remplir la mission qui lui est confiée. Votre réflexion concertée, dans le cadre de réunions comme celle d'aujourd'hui, vous permet de mieux comprendre l'évolution de votre environnement, de mieux voir venir les coups, de mieux préparer les bons et de mieux vous défendre des mauvais. Je veux donc vous féliciter pour cette concertation chaque jour plus étroite et plus fructueuse.

À titre de recteur de l'Université Laval et de président du Comité Québec-Capitale, je veux vous remercier d'avoir répondu à l'invitation de Richard Buteau à tenir votre réunion à Québec, dans la capitale. J'espère que de nombreuses autres organisations publiques et parapubliques québécoises trouveront plus assidûment le chemin de Québec pour faire de notre ville une capitale dans les faits et la vie de tous les jours, plutôt que le sujet de joutes oratoires occasionnelles sur son statut de capitale, nationale ou pas !

Vous êtes réunis dans la région de la capitale pour parler de l'acheteur du 3e millénaire. Vaste sujet… peut-être un peu ambitieux ! Si j'en juge en effet par l'évolution de nos sociétés depuis l'an 1000 jusqu'à aujourd'hui, je ne suis pas sûr qu'il eût été réaliste de demander à vos prédécesseurs européens en fonction en 999 de prévoir le travail de l'acheteur dans l'Europe de la Renaissance, de la Révolution française, de la Révolution tranquille ou dans le monde d'aujourd'hui. L'acheteur du deuxième millénaire a connu, sans aucun doute, de multiples incarnations. Il en sera de même de l'acheteur du troisième millénaire.

Vous me permettrez donc, sans vouloir jouer à l'éteignoir ou au rabat-joie, de vous suggérer de limiter un peu dans le temps mon propos et le vôtre. Je vous parlerai donc de l'acheteur du tout début du troisième millénaire et de ses défis. Et quand je dis "tout début", je ne suis pas sûr de la bonne échelle de temps à adopter. La prévision étant, chacun le sait, un art particulièrement difficile quand on veut l'appliquer à l'avenir plutôt qu'au futur antérieur, et en regardant le rythme d'évolution des choses depuis 50 ans, j'ai tendance à vouloir adopter l'échelle de l'année, peut-être de la décennie, sûrement pas plus. Allons-y donc pour le premier pour cent du troisième millénaire.

Dans toute grande organisation, l'acheteur joue un rôle central et pourtant périphérique - belle contradiction en apparence et cependant un bon reflet de la réalité.

Un rôle central parce que sans achats, sans intrants, pas de valeur ajoutée, pas d'action, pas d'extrants. Imaginez une usine d'auto sans acier, un restaurant sans aliments, une université sans papier ! Sans fonction d'approvisionnement efficace, aucune organisation n'est capable de survivre et de se développer. Et cette fonction est complexe, car elle est à l'interface de l'organisation qu'elle sert et qui évolue, et des fournisseurs qui changent dans un environnement lui-même de plus en plus changeant. Vous avez la tâche exigeante de répondre à des demandes qui se caractérisent par une plus grande diversité, une plus grande complexité, une plus grande qualité, et d'y répondre à partir d'un environnement qui, tout en étant plus compétitif et plus global, est aussi plus contraignant sous certains aspects, comme l'obsolescence planifiée des produits ou les exigences de volume pour assurer certains niveaux de service. Et vous devez faire tout ça en assurant à vos clients vitesse de réaction, qualité optimum et prix minimaux… le tout bien sûr avec le sourire !

Et pourtant un rôle périphérique, parce que, nul ne pourra le contester, GM n'existe pas pour acheter de l'acier, mais pour construire et vendre des autos, Paul Bocuse n'existe pas pour acheter des légumes, mais pour nourrir et régaler ses clients, l'Université n'existe pas pour acheter du papier, mais pour former des étudiants et produire de nouvelles connaissances. C'est donc votre défi renouvelé chaque jour d'accomplir votre rôle central de la manière la plus efficace, c'est-à-dire la plus effacée qui soit, pour que l'organisation puisse mobiliser l'essentiel de son énergie vers sa mission première, pour nous, universitaires, vers la formation et la recherche. S'ajoute ainsi, pour tout acheteur, le défi d'être aussi peu visible que possible, je dirai presque, aussi virtuel que possible, pour nous placer dans le contexte de votre thème du commerce électronique.

Je ne voudrais pas flatter indûment vos egos, mais je suis obligé de reconnaître que, de toutes les fonctions administratives, celle de responsable des approvisionnements est probablement celle qui est à la fois la plus exigeante et la plus difficile à reconnaître. Exigeante par la complexité croissante des demandes et de l'environnement; exigeante par les attentes d'économies dans un contexte de ressources réduites et de compétition accrue; difficile à reconnaître parce que d'autant moins visible qu'elle est bien accomplie.

Que nous réserve le troisième millénaire, ou plutôt ses premières années ? Plus de changement, plus d'attentes, plus de complexité, plus de diversité, moins de temps de réaction, moins de marge de manœuvre. Et, comme je suis un optimiste, je dirai plus de nouvelles façons de faire bien les choses, plus de qualité de service et plus d'économie.

Je vois ce début du troisième millénaire marqué par plusieurs grands facteurs.

À l'intérieur des universités:

Entre les universités:

Comment faire, par exemple, pour manœuvrer dans les différents marchés de l'énergie sinon en groupe capable de mobiliser des volumes importants ?

Comment faire, sinon en groupe, pour rétablir un minimum d'équilibre avec les fournisseurs dans le domaine du logiciel où les règles normales de la concurrence jouent de moins en moins et l'humeur de Bill Gates de plus en plus ?

Comment faire, sinon collectivement, pour reprendre le contrôle du marché des publications savantes où nous avons laissé s'établir une situation absurde ? Imaginez un peu : nos chercheurs fabriquent la matière première, les articles; ils les donnent gratuitement (quand ils ne payent pas) aux éditeurs; ils aident ces éditeurs, la plupart du temps bénévolement, à évaluer et sélectionner les meilleurs articles; après quoi, en guise de remerciement, ces éditeurs revendent leurs revues à nos bibliothèques à des prix exorbitants et en inflation constante ! Il est, là aussi, essentiel de nous regrouper, probablement à l'échelle mondiale, pour rétablir à la fois un ordre logique et notre santé financière.

De ce point de vue, votre Regroupement est un modèle qui doit se développer et s'élargir à d'autres institutions, à d'autres provinces et peut-être à d'autres pays.

Avec notre environnement:

Je sais que ces partenariats font beaucoup jaser dans les chaumières universitaires. Notre défi n'est pas de les éviter mais bien de les structurer pour y trouver notre profit sans y laisser notre âme. Cela est possible, mais va exiger une très grande rigueur de négociation et la prise en compte de considérations économiques certes, mais aussi académiques ou carrément éthiques. De ce point de vue, le débat actuel autour des partenariats est sain pourvu qu'il reste de l'ordre rationnel plutôt que dogmatique.

Aussi, pour ne prendre que l'exemple de l'Université Laval, nous sommes en train de mettre en place une politique rigoureuse de développement international axée sur une mobilité étudiante accrue. Pour atteindre nos objectifs, nous devrons certainement négocier de nouvelles ententes avec des transporteurs aériens, trouver les moyens d'aider nos étudiants à s'installer à l'étranger à des coûts acceptables, faciliter la venue chez nous de professeurs et d'étudiants étrangers.

Nous avons aussi à nous adapter au développement rapide de l'Université virtuelle et devenir à la fois acheteurs et fournisseurs de services de formation à l'échelle de la planète. Que de belles négociations en perspective !

Voilà donc les quelques réflexions que m'a inspirées votre thème "L'acheteur du troisième millénaire". Mais, à bien y penser, toutes ces réflexions sont plutôt pertinentes à l'acheteur de demain matin et, avec un peu de chance, à celui du 2 janvier 2000 !

Vous qui vivez dans le monde passionnant et exigeant des approvisionnements, vous qui vivez l'adaptation perpétuelle au changement accéléré des besoins universitaires, vous êtes sûrement bien mieux placés que moi pour tracer le profil de l'acheteur du premier pour cent du troisième millénaire. Et à en juger par les thèmes des conférences et ateliers qui seront présentés, je suis assuré que vous aurez progressé vers ce but au terme de votre réunion.

Dans une rencontre comme celle-ci, le contenu des communications est certes très important. Mais, vous le savez d'expérience, les contacts humains et les échanges informels le sont tout autant. Je souhaite que votre colloque connaisse un franc succès sur ces deux plans.

Si cette rencontre est réussie, on peut l'attribuer à la qualité des conférenciers, mais il ne faut pas oublier les heures nombreuses qu'a nécessitées son organisation. Je veux donc souligner le travail du comité organisateur, en particulier de Richard Buteau et de ses collaborateurs et collaboratrices, Jacques Bégin et Lucie Fréchette de l'Université Laval, Louise Savard de la Télé-Université, Danielle Joly de l'INRS et Louise Laflamme de l'ÉNAP. À vous tous et toutes, je souhaite un excellent colloque et un séjour agréable à Québec, et dans la région de la capitale… nationale.

 
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