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Allocution du recteur de l'Université Laval, M. Denis Brière, à l'occasion de la cérémonie de remise d'un doctorat honoris causa d'université à Monsieur Jean Béliveau, le samedi, 15 mars 2008, à 14h00,
au stade couvert du PEPS

Monsieur le Lieutenant-gouverneur du Québec,
Monsieur le Ministre responsable de la région de la Capitale Nationale,
Monsieur le Maire de Québec,
Madame la Secrétaire générale,
Monsieur le Récipiendaire d'un doctorat honoris causa,
Distingués invités,
Chers amis,

L'automne dernier, je recevais d'un de mes prédécesseurs au poste de recteur, Monsieur Jean-Guy Paquet, le dossier de candidature de Monsieur Jean Béliveau, ancien joueur de hockey renommé et philanthrope bien connu, à un doctorat honorifique de l'Université Laval.

Dans sa lettre, Monsieur Paquet signalait que Monsieur Béliveau avait déjà été honoré par des universités anglophones, mais par aucune université québécoise.

À son avis, avis que je partage bien évidemment, il était temps que cette situation soit corrigée. Il proposait que l'Université Laval, première université française d'Amérique, Université de la ville de Québec par excellence, reconnaisse les mérites exceptionnels de celui qu'on appelait jadis le " Gros Bill ", mais qui, à la vérité, est un grand homme. Il proposait aussi qu'on le fasse alors que notre ville, la plus ancienne d'Amérique au nord du Rio Grande, célèbre ses quatre cents ans.

Nous sommes donc réunis cet après-midi pour rendre un hommage particulier et bien senti à Monsieur Jean Béliveau, athlète professionnel retraité et philanthrope. Permettez-moi de rappeler ici les grandes étapes de sa magnifique carrière.

Né à Trois-Rivières, Jean Béliveau aura habité en Mauricie que très peu de temps car dès l'âge d'un mois, son père obtient un transfert dans la région des Bois-Francs, plus précisément à Victoriaville. C'est d'ailleurs dans cette ville que Jean Béliveau a grandi. Adolescent talentueux, il s'affirmait tout autant au baseball qu'au hockey. Dès l'âge de seize ans, en 1947, Jean Béliveau sera un athlète reconnu de toute la région et convoité dans ces deux sports.

Optant pour le hockey, il se retrouvera en 1949-50 avec les Citadelles de Québec, où il terminera au second rang, derrière Bernard Geoffrion, dans la colonne des pointeurs. La saison suivante, il terminera en tête des compteurs, avec 134 points. La légende naissait.

Jean Béliveau était une très, très grande vedette dans la capitale. Les plus jeunes ne le savent peut-être pas, mais comme le rappelait Me Marcel Aubut dans sa lettre d'appui à cette candidature, Jean Béliveau " a été la raison de la construction du Colisée de Québec ; on l'a bâti pour lui. "

Au terme de sa carrière junior, on lui a organisé une fête grandiose au centre de la patinoire du Colisée de Québec, tout en lui offrant une voiture de l'année. On raconte même que Maurice Duplessis, Premier Ministre du Québec, était attendu dans la vieille capitale pour un événement d'envergure en cette même journée. Mais comme Jean Béliveau devait aller signer des autographes pour la population, les médias et le public se sont déplacés pour couvrir les faits et gestes du joueur-vedette des Citadelles, au grand désappointement du Premier Ministre.

Par la suite, en 1953, Monsieur Béliveau entreprit la carrière exceptionnelle que l'on connaît avec Les Canadiens de Montréal. On a dit et écrit de Jean Béliveau que, comme joueur, il était l'élégance personnifiée, un véritable gentilhomme. À ce titre, il fut certainement l'un des joueurs les plus respectés dans la Ligue Nationale de Hockey autant par ses coéquipiers et adversaires que par les amateurs de toutes les villes de la ligue.

Son dossier de hockeyeur, encore exceptionnel aujourd'hui en 2008, fait état de 10 coupes Stanley gagnées en 18 saisons. Ses trophées personnels comprennent, entre autres, le Art Ross en 55-56, le trophée Hart en 55-56 et 63-64, le trophée Connie Smythe en 64-65. Il est membre du Temple de la renommée du hockey depuis 1972. De plus, Jean Béliveau a été sélectionné 10 fois au sein des deux premières équipes d'étoiles. Il a été un membre important de la dynastie des années 50 et de celle des années 60 du bleu-blanc-rouge.

J'oserais ajouter qu'à la grandeur du Québec et du Canada français, on s'ennuie encore de ces années fastes, et qu'on rêve de revivre un jour d'aussi fortes émotions avec notre sport national.

Lorsque Jean Béliveau a marqué son 500e but, le Canadien souhaitait l'honorer pour cet exploit. Jean Béliveau refusa qu'on le couvre de cadeaux. Il posa plutôt ses conditions, la principale étant la création d'une Fondation Jean Béliveau pour l'enfance.

Le soir de l'hommage, un chèque de 155 855 dollars fut donc remis à la Fondation qui continuera d'exister jusqu'en 1993, et qui fut par la suite transférée à la Société pour les Enfants Handicapés du Québec. En août 2000, la "Fondation du club de hockey Canadien pour l'enfance" a repris le flambeau allumé par notre récipiendaire.

Cette Fondation, Jean Béliveau y tenait beaucoup. Il l'a mise sur pied lui-même, aidé d'un comité, afin de venir en aide aux gens défavorisés, aux handicapés et à divers organismes de bienfaisance. Au fil des ans, la Fondation aura distribué près de 1,4 million de dollars pour aider les jeunes dans le besoin.

Fraîchement retraité comme joueur actif en 1971, Jean Béliveau est aussitôt nommé Vice-président du Canadien de Montréal. Il est aussi le seul ancien joueur de hockey à qui on a offert, en 1994, le poste de Gouverneur-Général du Canada, poste prestigieux qu'il déclina, préférant se consacrer pleinement à sa famille et à ses deux petits enfants, Mylène et Magalie.

Jean Béliveau prendra finalement sa retraite de son poste de vice-président en 1993, tout en continuant de siéger au conseil d'administration d'un certain nombre de compagnies, dont celui de la Brasserie Molson, et en acceptant aussi de devenir un des "ambassadeurs" les plus prestigieux du Canadien.

Monsieur Béliveau est nommé chevalier de l'Ordre national du Québec en 1988 et Compagnon de l'Ordre du Canada en 1998, ce qui est la plus haute distinction du pays. En 2002, Jean Béliveau annonce sa retraite définitive de toute activité professionnelle, après avoir été associé pendant cinquante ans à Molson. Il demeure toutefois "ambassadeur" du Canadien. Cette retraite fut l'occasion d'une cérémonie très émouvante au Centre Bell de Montréal, alors que les partisans de l'équipe et d'anciens coéquipiers ont l'occasion de lui témoigner leur grande admiration à son endroit.

Au début de 2005, Monsieur Béliveau décide de vendre aux enchères la plupart des souvenirs associés à sa carrière : bagues de Coupe Stanley, chandails, trophées. La vente est un succès au-delà de toute espérance, et rapporte près d'un million de dollars, soit le double de ce que l'on espérait, et plus que ce que Jean Béliveau avait gagné durant toute sa carrière de hockeyeur !

Monsieur Béliveau a d'ailleurs répété ce geste le mois dernier : en février, il a mis en vente sa collection de souvenirs du hockey au profit des enfants dans le besoin.

Aujourd'hui, Monsieur Jean Béliveau est sans doute une des personnalités québécoises les plus respectées, tous domaines confondus. Il a mené une vie exemplaire, ayant été et étant toujours un modèle pour plusieurs générations. Tout autant que ses prouesses sur la patinoire, la personnalité de cet homme simple et réservé a contribué à en faire un véritable ambassadeur pour son sport et son pays.

L'an dernier, lors d'une activité en l'honneur de Jean Béliveau, le premier ministre du Canada, M. Stephen Harper disait, et je cite : " dans le sport, comme en politique, la perfection n'existe pas. Mais il arrive parfois, rarement plus d'une fois par génération, qu'une personne incarne à elle seule, grâce à son talent naturel et à ses qualités personnelles, le sommet de sa profession et l'idéal de ses compatriotes. Cette personne personnifie alors la fierté de tout un peuple. C'est ce qu'a fait Jean Béliveau pendant toute sa carrière de joueur de hockey, mais aussi après celle-ci, avec une dignité, une humilité et une sérénité exemplaires. " Fin de la citation.

L'Université Laval est, aujourd'hui, extrêmement fière d'honorer ici dans la capitale et comme il se doit cet homme exceptionnel, ce grand Québécois, ce modèle d'inspiration pour les jeunes, ce gentilhomme dans le sens le plus noble et profond du terme.

Monsieur Jean Béliveau, je vous invite à recevoir le diplôme de docteur honoris causa, à revêtir l'épitoge, et à signer le livre d'or de l'Université Laval.

 
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