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Allocution de M. Michel Pigeon, recteur de l'Université Laval, à l'ouverture du Colloque "La production et la transmission du savoir : Le destin de l'université au 21e siècle", au pavillon La Laurentienne,
le vendredi 11 avril 2003

Monsieur le Recteur de l'Université du Québec à Montréal et cher ami,
Monsieur le Président des Grandes Fêtes de l'Université Laval,
Monsieur le Président de ce colloque,
Chers collègues et amis,

Permettez-moi tout d'abord de remercier Olivier Clain pour l'invitation qu'il m'a faite de vous dire un mot ici ce matin, à l'ouverture de ce colloque qui veut examiner, à partir des concepts de la production et de la transmission du savoir, le destin de l'université au 21e siècle. Voilà un programme ambitieux, certes, mais combien nécessaire.

En effet, parmi les défis que soulève l'avenir de l'institution universitaire, il y a la prise en compte, dans tout projet de formation, de l'humanité considérée dans son intégralité. À cet égard, il est sain, utile et nécessaire que des intellectuels, des universitaires prennent le temps non seulement de réfléchir à la question de la mission de l'université dans le monde contemporain, mais aussi d'examiner de façon critique les nouvelles conceptions de la recherche associée à l'économie du savoir.

Il serait vain de croire que l'explosion de la recherche subventionnée et commanditée dans l'université contemporaine n'a pas d'impact sur la perception que les communautés universitaires tout aussi bien que nos concitoyens en général peuvent se faire de nos institutions de haut savoir.

Il y a quelques années, des collègues réunis dans ce qui s'est appelé le Colloque de Glion de 1998, ont émis une Déclaration dont je veux vous citer un extrait : " L'université constitue l'une des inventions majeures de ce millénaire; bien que créée il y a plus de neuf siècles, elle demeure l'une des splendeurs des aspirations de l'homme et l'un des triomphes du pouvoir de l'imagination.1 " Fin de la citation. Il est nécessaire, dans la discussion que vous aurez aujourd'hui, de placer cette institution humaine qu'est l'université dans sa juste perspective.

Sur ce sujet précis de la perspective historique, Sir John Daniels, ancien vice-chancelier de l'Open University de Grande-Bretagne et aujourd'hui sous-directeur général pour l'éducation à l'UNESCO, rappelait dans un discours prononcé à Toronto en 2000 ce qui suit : " En prenant l'année 1530 comme point de départ, c'est-à-dire lorsque l'Église luthérienne a été fondée, il y a en Occident quelque 66 institutions qui existaient alors, et qui existent toujours dans une forme identifiable : l'Église catholique, l'Église luthérienne, le Parlement d'Islande, celui de l'Île de Man2 , et 62 universités. Toutes ces institutions ont traversé les guerres, les révolutions, les dépressions et les transformations industrielles, et elles en sont sorties moins changées que presque tout autre secteur des sociétés où elles agissent. " Fin de la citation.

John Daniels ajoutait que ce n'était pas là un motif de complaisance ou une preuve de l'infaillibilité de l'université. Il incitait plutôt ses auditeurs à se rappeler cette réalité historique comme l'évidence que l'idéal universitaire fondamental touche une corde très profonde au sein de l'esprit humain.

Nos universités ont un devoir de fidélité à cet idéal, et nos contemporains, nos concitoyens et concitoyennes, consciemment ou non, comptent sur notre fidélité à cet idéal universitaire. Je ne veux pas anticiper sur les discussions que vous tiendrez aujourd'hui. Mais si l'université cesse d'être ce lieu de haute culture, comme l'écrit Olivier Clain dans sa présentation de ce colloque, si elle ne devient qu'un marché du " savoir-faire spécialisé, " ne trahit-elle pas l'idéal universitaire fondamental auquel John Daniels faisait référence dans la citation de tantôt ?

J'aime rappeler la Déclaration de Glion qui énonce les responsabilités profondes des universitaires dans le présent changement de millénaire. Dans leur conclusion, les auteurs de cette Déclaration écrivent, et je cite : " À travers sa vie collégiale et ses activités académiques, il appartient à l'université de réaffirmer que l'intégrité est l'exigence, l'excellence la norme, la rationalité le moyen, la communauté le contexte, la civilité l'attitude, l'ouverture d'esprit la base des relations et la responsabilité l'obligation sur lesquels repose sa propre existence et dont le savoir lui-même est fonction. Durant 900 ans, l'université, en tant que communauté tout entière vouée à la défense de ces valeurs, a rendu de grands services à la société. Son efficacité au cours du millénaire à venir dépendra de la façon dont elle réaffirmera ces valeurs séculaires tandis qu'elle devra répondre de manière novatrice aux nouveaux défis et saisir les nouvelles opportunités qui se présenteront à elle.3 " Fin de la citation. Réaffirmer nos valeurs séculaires, répondre de manière novatrice aux défis sans cesse renouvelés, voilà donc ce chemin exigeant et difficile des universités en ce nouveau millénaire.

Je souhaite que vos réflexions soient fécondes et utiles à tous ceux et celles qui, comme moi et mon collègue de l'UQAM ici présent, ont pour mission de diriger l'université dans les années que nous vivons, et je vous remercie à l'avance de votre contribution à cette réflexion. Je remercie également de leur travail tous les organisateurs de la rencontre d'aujourd'hui qui est un moment important et proprement universitaire de nos Grandes Fêtes.

Je vous souhaite un excellent colloque, et je vous remercie de votre attention.

1 Déclaration de Glion, Glion, 1998.
2 On l'appelle le Tynwald Court et il existe depuis 1 000 ans
3 Déclaration de Glion, Glion, 1998

 
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