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ALLOCUTION DE M. FRANÇOIS TAVENAS, RECTEUR DE L'UNIVERSITÉ LAVAL, À L'OCCASION DE LA COLLATION DES GRADES DE LA FACULTÉ DE DROIT, DE LA FACULTÉ DES SCIENCES SOCIALES ET DE L'INSTITUT QUÉBÉCOIS DES HAUTES ÉTUDES INTERNATIONALES, LE SAMEDI 15 JUIN 2002, À 16 H 30, AU STADE COUVERT DU PEPS

Monsieur le Secrétaire général,
Madame la Récipiendaire d'un doctorat honorifique,
Distingués invités,
Chers collègues,
Chers diplômés,

C'est un plaisir pour moi de vous souhaiter la bienvenue à cette collation des grades de l'année universitaire 2001-2002. Nous célébrons aujourd'hui la réussite des étudiantes et étudiants de la Faculté de droit, de la Faculté des sciences sociales et de l'Institut québécois des hautes études internationales. Je dis "nous célébrons" parce que plusieurs personnes sont associées à votre succès. Même les plus vaillants, les plus organisés d'entre vous n'auraient pas atteint ce fil d'arrivée sans le soutien de beaucoup de personnes. Je crois qu'il est important de parler d'eux, d'abord de vos parents, qui vous ont élevés, soutenus, réconfortés, qui se sont préoccupés de vous assurer un avenir prometteur, qui ont rêvé de vous voir terminer vos études et qui vous ont encouragés de multiples façons pour vous donner toutes les chances de réussir dans la vie. Tous les membres de votre famille, vos sœurs, vos frères, vos grands-parents ont contribué, chacun à leur manière, à votre réussite et partagent aujourd'hui votre fierté. N'oubliez pas vos amis, qui ont cru en vous, qui étaient sûrs que vous réussiriez, quand parfois vous-mêmes vous en doutiez. Vous avez peut-être une conjointe, un conjoint, et même des enfants, qui sont avec vous en ce samedi de fête et qui, après avoir partagé vos espoirs et angoisses d'étudiant ont hâte d'entrer avec vous dans la vraie vie d'adulte.

Cette année, les collations des grades revêtent une teinte particulière puisque, comme vous le savez sans doute, l'Université Laval célèbre en 2002 le 150e anniversaire de l'octroi de sa charte par la reine Victoria et le 340e anniversaire de la fondation du Séminaire de Québec, l'institution d'où elle tire ses origines.

Ces anniversaires nous donnent l'occasion de jeter un regard sur le riche héritage que nous ont légué nos prédécesseurs. Saviez-vous que, parmi les premiers diplômés en droit de l'Université Laval se trouvent des personnes qui ont joué un rôle marquant dans leur milieu?

Le temps me manque évidemment pour les énumérer tous. Je dirai simplement quelques mots d'Adolphe-Basile Routhier, qui termina ses études de baccalauréat ès arts en 1858 et fut admis au barreau en 1861.

Routhier pris goût très tôt à la littérature, à la poésie et à l'art oratoire, dans lequel il excella d'ailleurs toute sa vie. Il consacrait ses loisirs à la création littéraire. En 1867, à l'occasion d'un concours de poésie de l'Université Laval, il remporta la médaille de bronze pour sa composition sur la Découverte du Canada, tandis que Pamphile Le May recevait la médaille d'or.

À partir de 1872, il occupa les fonctions de juge de la Cour supérieure de la province de Québec pour le district de Saguenay. En 1897, il fut nommé juge de l'amirauté à la Cour de l'échiquier du Canada. Professeur de droit international à l'Université Laval depuis 1883, il devait occuper ce poste jusqu'à sa mort. Il fut aussi juge en chef de la Cour supérieure de la province de Québec de 1904 à 1906, et on lui confia en 1905 la charge d'administrer la province en l'absence du lieutenant-gouverneur, sir Louis-Amable Jetté.

Durant sa carrière de juge, Routhier fut aussi un écrivain prolifique. En 1880, il composa les paroles de ce qui allait devenir l'hymne national Ô Canada, mis en musique par Calixa Lavallée.

D'autres diplômés des facultés de droit et des sciences sociales ont fait leur marque dans leurs domaines respectifs sur les scènes nationale et internationale. Rappelez-vous que les penseurs de la Révolution tranquille ont été, pour la plupart, des diplômés de Laval. Rappelez-vous que la Cour Suprême du Canada a pu compter des diplômés de Laval parmi ses membres tout au long de son histoire, sauf pour une très courte période au début du siècle. Rappelez-vous aussi que plusieurs premiers ministres du Canada et du Québec ont été des diplômés de notre université, tout comme le sont aujourd'hui un grand nombre des ambassadeurs de notre pays aux quatre coins de la planète.

Chers diplômés, vous êtes les héritières et les héritiers de ces diplômés remarquables qui ont fait progresser la société en leur temps. L'exemple d'Adolphe-Basile Routhier me donne l'occasion d'insister sur l'importance de développer tous vos talents, et non pas seulement vos compétences spécialisées, lorsqu'on exerce des professions telles que les vôtres, si proches de l'être humain et qui touchent un grand nombre de sphères d'activité.

Certains d'entre vous continueront leurs études aux cycles supérieurs, et vous aurez pris une bonne décision. En ces temps de technologie conquérante et de mondialisation, avec son cortège de bouleversements sociaux, la société a besoin de chercheurs pour mieux comprendre les grands changements qui touchent la politique, l'économie, l'organisation sociale, les droits et libertés. La recherche dans vos domaines doit se développer rapidement pour permettre à notre société de maîtriser ces changements et d'assurer qu'ils se font au service des personnes, au service de l'équité et de la justice, au service du progrès social universel plutôt qu'au service de quelques privilégiés, États, entreprises ou individus. Par ailleurs, dans plusieurs disciplines des sciences humaines, la formation de deuxième cycle est de plus en plus en demande. Ainsi, notre Institut québécois des hautes études internationales et son programme de maîtrise en relations internationales, l'un des rares au Canada, prépare les jeunes à travailler utilement dans le domaine des relations internationales. La société québécoise peut désormais compter sur des professionnels compétents pour défendre les intérêts de nos entreprises et de nos gouvernements sur la scène internationale.

Je voudrais m'adresser maintenant à ceux et celles d'entre vous, la majorité je crois, qui souhaitent amorcer une vie professionnelle et prendre dans la société la place qui convient à leurs aspirations et à leur formation.

Vous le savez sans doute, de grands défis vous attendent, et vous avez pu prendre connaissance d'un certain nombre d'entre eux au cours des derniers mois. Vous avez pu constater, par exemple, qu'en raison des accords de libre-échange et des rapports internationaux de plus en plus fréquents, le droit international prend de l'importance. De nouveaux besoins se font jour, pour faire face par exemple à la protection des écosystèmes et au développement des technologies de l'information et de la communication, besoins qui appellent de nouvelles pratiques tels le droit de l'environnement et le droit de l'informatique.

Vous vous êtes rendu compte que les progrès de la science et de la technologie soulèvent à la fois de l'enthousiasme et de vives inquiétudes. Tout récemment encore, la mise au point de techniques de clonage et la perspective de l'application à l'être humain suscitent une méfiance quant aux décisions que pourraient prendre les scientifiques ou l'État qui auraient des répercussions sur notre vie. Dans toutes ces questions, une dimension cruciale doit intervenir : l'éthique.

Vous aurez aussi été amenés à constater que le désengagement de l'État, le vieillissement de la population, le nombre croissant des laissés pour compte de l'économie mondialisée incitent notre société à repenser ses objectifs et ses modes d'action, à développer de nouvelles solidarités aux niveaux local, national et international.

Vous avez vu que la tendance à l'individualisme, la férocité de la concurrence, l'écart grandissant entre les riches et les pauvres imposent un retour à des valeurs fondamentales de solidarité, d'éthique et de justice.

Vous avez vu enfin que l'une des conséquences les plus marquantes de la mondialisation des marchés et des communications est sans aucun doute la complexité grandissante de notre monde. L'interpénétration et l'interdépendance des sociétés exigent qu'un regard lucide soit porté sur cette complexité sociale. Pour contribuer à résoudre les grands problèmes de la société, on fera appel à vous, les spécialistes des dimensions humaines et socioculturelles des rapports sociaux. C'est de vous, qui possédez un diplôme universitaire, qu'on attendra des interventions et des décisions éclairées. Le diplôme que vous avez reçu vous donne une autorité, une voix.

Vous vivrez dans un monde dont le trait caractéristique sera sans contredit le changement. Il faudra donc que vous soyez prêts à l'adaptation continue, adaptation aux nouvelles connaissances, aux nouvelles technologies, aux nouvelles méthodes de travail, adaptation aussi aux nouvelles préoccupations sociales, au contexte économique changeant. Mais je ne suis pas inquiet pour vous, car vous avez reçu une excellente formation. Vous avez entre autres acquis une chose précieuse, peut-être la plus précieuse : l'envie d'en savoir plus.

Réciproquement, nous comptons sur vous pour nous faire part, dans les années à venir, des changements qui toucheront votre profession pour que nous puissions adapter nos programmes de formation. C'est à cette seule condition que l'Université pourra maintenir le niveau d'excellence sur lequel repose sa réputation.

Depuis plus de trois siècles, l'Université Laval poursuit en effet l'excellence tant dans ses programmes de formation que dans ses travaux de recherche. C'est ce degré d'excellence que l'Université veut mettre en valeur chez Mme Catherine Teiger, chargée de recherche au Centre national de la recherche scientifique de France, en lui remettant aujourd'hui un doctorat honorifique en sciences sociales. Mme Sylvie Montreuil, professeure à la Faculté des sciences sociales, présentera Mme Teiger dans quelques instants.

Chers diplômés, voilà un modèle dont vous pouvez vous inspirer. N'oubliez pas que, comme Adolphe-Basile Routhier et comme vous aujourd'hui, ce professeur a commencé par recevoir un diplôme. Je vous invite aussi à suivre l'exemple de Mélanie Archambault, étudiante à la maîtrise en psychologie, qui reçoit aujourd'hui la médaille d'or de la Gouverneure générale, et d'Annie Sanscartier, étudiante au baccalauréat en psychologie, qui reçoit la médaille d'argent de la Gouverneure générale. Je laisserai à M. André Côté, secrétaire général, le soin de présenter Mmes Archambault et Sanscartier dans quelques instants.

Il est temps de clore ce discours, car je crois sentir votre impatience de tenir enfin le diplôme que vous méritez. Chers diplômés, je vous offre de nouveau mes sincères félicitations pour cette réussite remarquable. Je vous souhaite de réussir à garder un équilibre entre ce que vous faites pour vous et ce que vous faites pour les autres, entre vos engagements pour changer le monde et vos devoirs envers ceux qui vous entourent, entre le travail intellectuel et la santé, et surtout, entre vos besoins personnels et vos obligations professionnelles. Donnez-vous du temps pour la réflexion, pour la famille, pour les autres, pour le ressourcement.

Une cérémonie de cette envergure nécessite, vous vous en doutez bien, une organisation parfaite. Je tiens à remercier le personnel du Bureau du secrétaire général, en particulier celui de la section des diplômes, ainsi que le personnel du Service des communications, pour leur dévouement au cours des dernières semaines. C'est grâce à toutes ces personnes que cette célébration peut se dérouler sans anicroche et rester dans votre mémoire comme une grande fête.

Plus tard, quand vous vous souviendrez de cette cérémonie, j'espère que l'image qui vous viendra à l'esprit sera le sourire de vos confrères et consœurs, de vos parents, de vos amis.

Je vous souhaite un avenir heureux et rempli de succès au service de vos concitoyens et de toute la société et, pour conclure, j'emprunte une expression de l'Honorable Raymond Chrétien, récipiendaire d'un doctorat honorifique de l'Université Laval : "Allez, le monde vous attend."

 
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