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Allocution prononcée par monsieur François Tavenas, recteur de l'Université Laval, à la cérémonie d'ouverture du Colloque "les cultures en transition et le défi du pluralisme", le dimanche 21 avril 2002, à 17 h, au Musée de la civilisation

Excellence,
Monsieur le Maire,
Monsieur le Représentant de la Direction générale du Musée de la civilisation,
Monsieur le Directeur du Centre interuniversitaire d'études sur les lettres, les arts et les traditions,
Distingués invités,

C'est un honneur pour moi de vous adresser quelques mots à l'ouverture du colloque "Les cultures en transition et le défi du pluralisme". C'est un honneur, mais c'est aussi un plaisir, et la tenue de cette rencontre a plusieurs raisons de nous réjouir.

D'abord, il s'agit de la première des activités scientifiques à se produire dans le cadre des célébrations du 150e anniversaire de l'Université Laval et du 340e anniversaire du Séminaire de Québec. Comme vous le savez peut-être, les Grandes Fêtes de l'Université Laval ont commencé le mois dernier et se poursuivront jusqu'en mai 2003. Toute une série d'activités se dérouleront pendant cette période, des activités destinées tantôt aux scientifiques, tantôt au grand public, tantôt aux deux, comme le présent colloque. Il me semble intéressant de souligner que des colloques semblables avaient été organisés lors des fêtes du centenaire de l'Université, en 1952, et que des conférenciers prestigieux avaient suscité des brassages d'idées dont plusieurs prétendent qu'ils ont amorcé les bouleversements de la Révolution tranquille.

Cinquante ans plus tard, nous avons nous aussi toutes les raisons de nous réjouir de la présence de conférenciers de haut calibre qui vont assurer une grande visibilité au colloque et aux chercheurs de l'Université Laval. Je voudrais saluer bien chaleureusement Son Excellence John Ralston Saul qui nous fait l'honneur de se joindre à nous pour cette soirée d'ouverture.

En parcourant le programme, mon attention a été attirée par le mot "passeur", l'"intellectuel penseur et passeur". Ce mot m'a ramené à une lointaine lecture du livre de Herman Hesse, Siddhartha. Souvenez-vous, à la fin de son périple, le héros rencontre un vieux passeur qui le prend à son service pour effectuer les traversées du fleuve. Le narrateur explique que "le fleuve était la voix des choses vivantes, la voix de ce qui est". Il dit aussi que "l'une des grandes qualités du passeur, c'est qu'il savait écouter comme peu de gens le savent".

Je crois que devant l'ampleur et la gravité des ébranlements contemporains, nos sociétés ont de plus en plus besoin de "passeurs". Les passeurs sont en effet essentiels d'abord comme transmetteurs de mémoire, qui aident à comprendre d'où nous venons. Ils sont essentiels ensuite par leur capacité d'interpréter les grands mouvements qui agitent notre planète et d'écouter les voix divergentes, plurielles qui se font entendre et qui remettent en cause l'idée de valeurs communes. Ils sont essentiels encore pour nous permettre de nous situer dans le présent par rapport à notre histoire, pour nous permettre de choisir notre avenir en infléchissant notre trajectoire historique.

Ces passeurs, ces intellectuels doivent toutefois être attentifs à nous garder des dérives meurtrières qui peuvent surgir lorsque l'affirmation d'une identité s'accompagne de la négation ou de l'exclusion d'autres identités. Ils ne doivent pas se laisser enfermer dans une vision simpliste, monolithique, de la mémoire collective, mais plutôt laisser chaque individu se situer dans sa propre identité. Le passeur, l'intellectuel doit fournir un cadre de référence, pas un modèle unique. Des intellectuels de grand renom, tels Amin Maalouf et Edgar Morin, se sont penchés sur la recrudescence et les dangers du phénomène identitaire et nous ont donné des pistes de réflexion.

Pour jouer pleinement son rôle, l'intellectuel peut intervenir sur plusieurs tribunes, mais je crois qu'un colloque comme celui que nous inaugurons ce soir est un moment de prédilection, car il oblige à faire un temps d'arrêt au milieu du rythme effréné de la vie moderne. Et ici j'emprunterai à John Saul un extrait des Bâtards de Voltaire : "L'espoir qui subsiste réside précisément dans la démarche, lente et proche de la réalité, de l'humaniste."

Chères participantes, chers participants, les chercheurs qui vous accueillent ce soir appartiennent à une université qui jouit d'une longue tradition d'humanisme. Je tiens à féliciter les organisateurs du colloque d'avoir choisi un thème à la fois important et préoccupant qu'est le pluralisme. Le CELAT, en particulier son directeur, Guy Mercier, et la Chaire en histoire et économie politique du Québec contemporain, en particulier son titulaire, Jocelyn Létourneau, méritent nos remerciements pour leur clairvoyance et pour le temps et l'énergie qu'ils ont déployés afin que ces trois journées soient une réussite. Par la variété des sujets et la qualité des conférenciers, je suis convaincu que ce rassemblement sera des plus féconds et des plus utiles pour la société québécoise.

Dans une rencontre comme celle-ci, le contenu des communications est certes très important. Mais, vous le savez d'expérience, les contacts humains et les échanges informels le sont tout autant. Je souhaite que votre colloque connaisse un franc succès sur ces deux plans.

Je vous souhaite à toutes et à tous des échanges fructueux et un agréable séjour à Québec.

 
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